Les entreprises détenues ou dirigées par des femmes représentent une part croissante de l’ensemble des entreprises dans de nombreux pays africains. Des études indiquent que jusqu’à un tiers (34,5 %) des entreprises formelles en Afrique subsaharienne (ASS) font état d’une participation des femmes à la propriété (Banque mondiale, 2011). Les marchés publics représentent un marché intéressant pour les femmes entrepreneures car ils représentent 15 à 30 % du PIB au niveau mondial. En outre, les marchés publics peuvent parfois consommer jusqu’à 50 % du PNB dans certains pays. Les marchés publics créent donc des opportunités de marché qui sont reconnues depuis longtemps comme un moteur de croissance pour les petites et moyennes entreprises.
Pourtant, les petites et moyennes entreprises appartenant à des femmes sont gravement sous-représentées en tant que fournisseurs, puisqu’elles n’obtiennent qu’environ 1 % des marchés publics. En Afrique de l’Ouest, les femmes restent sous-représentées en tant qu’entrepreneures ayant accès aux marchés publics. Au Sénégal, par exemple, une étude commandée par ONU Femmes note que moins de 10% des femmes entrepreneures connaissent la législation sur les marchés publics et moins de 5% déclarent être pleinement conscientes du processus et des modes de passation des marchés publics. Les disparités entre la participation économique des femmes et la croissance inclusive existent en partie parce que la plupart des entreprises féminines s’engagent actuellement aux niveaux méso et micro de l’économie informelle et ne sont pas impliquées dans des activités de niveau macro telles que la passation de marchés publics de biens et de services.
Le système actuel de passation des marchés publics au Mali (Décret n°2015-0604/P-RM du 25 septembre 2015 portant code des marchés et des délégations de service public et ses textes d’application) est en grande partie le résultat de la transposition de ces textes communautaires.
Les entreprises détenues par des femmes n’atteignent pas plus de 1% des marchés publics, ce qui signale l’existence de procédures systémiques de disparités entre les sexes au sein des systèmes d’approvisionnement, très défavorables aux femmes.
L’approvisionnement public représente à lui seul 15-30% du PIB des pays et fournit un marché de plusieurs milliards de dollars.
En 2016, la passation des marchés publics au Mali représente plus de 60 % de l’exécution des crédits du budget de l’Etat et des concours financiers des partenaires techniques et financiers.
Le Mali a révisé sa réglementation relative aux marchés publics en 2015. Le décret N°2015-0604/P-RM du 25 septembre 2015 a abrogé la réglementation antérieure, notamment le Décret n°08-485/P-RM du 11 août 2008 et vaut désormais code des marchés publics.
Le Mali dans un soucis de favoriser l’accès des PME à la commande publique, dispose d’un décret n°2018-0473/PM-RM du 28 mai 2018 portant adoption de mesures d’orientation de la commande publique vers les petites et moyennes entreprises et la production nationale. Cependant ce décret n’a pas de dispositions spécifiques concernant les entreprises féminines qui sont confrontés à des obstacles encore plus prononcés dans le cadre du développement de leurs entreprises et de leur accès à la commande publique. Bien qu’ouvert à toutes les entreprises pouvant répondre aux critères d’accès à la commande publique, les entreprises féminines semblent être largement à la traîne par rapport aux entreprises appartenant à des hommes.
Les femmes entrepreneures sont confrontées à des obstacles structurels importants qui limitent leur croissance et leur développement. Les femmes ont tendance à être plus touchées par la pauvreté que les hommes, elles ont une connaissance limitée des processus/politiques de passation de marchés existants et du soutien disponible, et ont un accès limité au financement et au capital. En outre, les femmes produisent moins en raison du temps, de la pauvreté, c’est-à-dire du fardeau des soins non rémunérés, et du manque notable de ressources telles que la terre, les actifs, l’énergie, les technologies et l’information. En outre, les femmes ont généralement un niveau d’éducation, d’alphabétisation et de compétences commerciales plus faible, et elles sont confrontées à des obstacles culturels et/ou juridiques tels que la permission de leur mari pour créer une entreprise, obtenir un prêt, etc.
En ce qui concerne les obstacles courants que les femmes rencontrent de manière spécifique pour accéder aux marchés publics sont notamment les suivants :
- La corruption, les pots-de-vin, le favoritisme/népotisme dans les structures gouvernementales, y compris sous la forme de harcèlement sexuel et de violence sexiste. Au Sénégal, selon une enquête réalisée par ONU Femmes, la corruption monétaire est plus fréquente avec 34% des femmes interrogées, 27% font l’expérience du népotisme et 3% du harcèlement pour obtenir des marchés publics.
- Une mise en œuvre incohérente et une interprétation différente des politiques de passation de marchés préférentiels par les diverses institutions du gouvernement.
- Une information limitée. Au Sénégal, selon les mêmes sources, les femmes entrepreneures déclarent qu’elles rencontrent très souvent des difficultés liées à la rédaction des offres (45%) et manquent de capacités techniques pour exécuter le contrat (40%). Les femmes entrepreneures n’ont pas non plus accès aux informations et aux réseaux pour répondre aux appels d’offres.
- Les longs délais de paiement de la part des entités adjudicatrices gouvernementales découragent également les petites entreprises appartenant à des femmes de soumissionner. C’est l’une des conclusions des consultations avec les entreprises dirigées par des femmes au Nigeria.
Tout ce qui précède renforce un cycle négatif et empêche les entreprises dirigées par des femmes d’accéder aux marchés et de développer leur capacité d’offre. En conséquence, les femmes entrepreneures et propriétaires d’entreprises ont été largement incapables de tirer parti des dépenses publiques et de l’approvisionnement international. |